- Fitear Togo! 334 - 1200€
- Spiral Ear SE5 - 1269€
- Joyroom E107 - 11€
Alors oui, les prix ne sont pas une blague, je vais réellement tenter le comparo 1 pour 100. Quoi ? 1% de ces concurrents vous dites ? Non, point du tout, vous n'y êtes pas, je dis 1% du prix. Toujours ça de pris dit-on, et l'occasion de vérifier l'adage : le diable se trouve dans les détails.
Car l'audiophile est-il raisonnable ? Pour traîner sur ce site, nous savons tous malheureusement que pas du tout, ou alors on apprécie se voiler la face (à défaut d'aimer les intras voilés). Aussi il faut savoir par moment se remettre sur le droit chemin, redescendre sur Terre et faire des choses totalement normales : écouter des intras à 11€, comme tout le monde. L'avantage de telles comparaisons est de se remettre dans le contexte, reprendre pied avec la réalité et ne pas trop s'éloigner du reste du monde.
Le contexte :
En plus des intras susmentionnés, mon fidèle Nokia Lumia 1520 aura l'immense joie de servir de source, et ce, pour tous les protagonistes en présence. Un téléphone dis-je ? Oui, car depuis maintenant bientôt 6 mois j'ai abandonné les DAP (AK1xx, Tera, Questyle) pour revenir dans le monde merveilleux des smartphones après avoir réalisé que mes oreilles prenaient tout autant de plaisir sur ces couteaux suisses à l'interface et la stabilité autrement plus grande que tous les DAP audiophiles auxquels nous nous habituons. Ceci pour donner du grain à moudre à ceux qui pourraient être décontenancés par mes conclusions, nous avons chacun nos oreilles, nos préférences, aussi est-il bon de connaître le référentiel de chacun.
La méthode :
Très simple, j'écoute à tour de rôle chaque intras sur un même titre avec le réglage du niveau du son de telle manière que chaque intra donne une sensation à peu près identique de volume sonore. Le titre tourne ainsi toujours sur la même séquence et les intras dansent dans mes oreilles, j'adapte le niveau du son, je prends des notes, je retire, je remets et je change de piste.
Présentation :
Il est toujours bon de refaire le tour du propriétaire. Les Fitear Togo! 334 pour commencer. Une qualité de fabrication impressionnante, une finitions nickel et une impression de solidité évidente. Il suffit de voir la canule en titane ultra propre pour savoir qu'on touche à l'orfèvrerie. Les Spiral Ear SE5 pour leur part sont moulés et en silicone, rien à voir donc, mais si l'extérieur est propre et sobre, l'intérieur est un gros bordel laissant deviner les multiples (4) crossover de ce 5 voies/5 trous. Et les Joyroom E107. Evidemment, vu la différence de prix, on a droit à une différence de construction. Evidente. Incontournable. Les intras sont tout petits, premier point. Le câble fait pitié à côté de ses grand frères, mais il a le grand mérite de ne pas trop s'emmêler (même s'il le fait). La construction en métal rassure, mais on sait tous que ce sera toujours les jointures câble/intra ou câble/jack qui craqueront en premier, et à ce niveau, je ne peux m'empêcher de me dire que ça arrivera immanquablement si je le prends dehors tous les jours.
Les embouts :
Les SE5 étant moulés, évidemment pas de problème d'embout, ultra confort, pas de fatigue. Les Togo! 334 sont corrects mais ne peuvent prétendre au confort absolu du part leur taille qui ne conviendra pas à tous et leur canule assez large. Niveau embouts je les ai assortis des JVC Spiraldot (taille ML si vous voulez tout savoir) car c'est le meilleur compromis confort/isolation/son que j'ai pu trouver. Cela reste imparfait sur le confort car je dois toujours les remettre dans les oreilles de temps en temps, mais c'est acceptable. Les E107 eux profitent à plein de leur toute petite taille. Ils s'insèrent aisément et en gardant les embouts silicones moyen fournis de base, j'ai un très bon port. Attention toutefois, ils sont extrêmement sensibles à la manière dont l'insertion est faite. Le son peut changer du tout au tout. Niveau isolation, je dirais que le classement est la suivant :
SE5 > TG! 334 > E107
Le son s'il te plaît Jean-Pierre.
Vous avez été très patients si vous avez tenu ma prose jusqu'ici, car voilà le cœur du problème désormais. Il faut savoir tout d'abord la chose suivante : chacun de ces intras à sa sensibilité propre. En effet, si les TG! 334 sans surprise sont les plus faciles à driver avec une position à 14/30 sur mon Lumia, les SE5 se montrent étonnamment proches en terme d'exigence avec un 16/30 pour obtenir le même volume sonore. Tandis que les E107 confirment que les drivers dynamiques peuvent se montrer très gourmands (problème de sensibilité plus que d'impédance ?) avec un 20/30 pour obtenir un volume sonore équivalent.
Les chansons ensuite :
Korn - Here to Stay
Un titre bourré de medium/bas medium/basses, enregistré avec majesté et qui donne un aperçu de la qualité des intras à détourer le message en même temps que restituer cette zone du spectre.
Miles Davis - Pharao's Dance
Le but devient plus la focalisation sur les petits détails, la capacité à faire vivre la musique.
Dredg - The Pariah, the Parrot, the Delusion
Album de post rock et titre superbement enregistrés, une prise de son ultra propre et précise. Les multiples couches donnent l'occasion de savoir ce que l'intra a à revendre en terme de détail, séparation des instruments.
Darkthrone - Transilvanian Hunger
L'exact opposé, du black metal ultra crade, ultra mal enregistré. L'intra doit être tolérant aussi.
Daft Punk - Lose Yourself to Dance
Evidemment non ? Peut-on vraiment se passer de cet album quand on écoute de la pop et qu'on teste des intras ?
Globalement il ressort très clairement une chose, ces intras sont presque tous complémentaires tant leurs signatures sont éloignées. Les TG! 334 respirent plus en laissant un champ d'expression aux aigus plus important tandis que les SE5 s'étalent sur tout le spectre avec une emphase sur les medium/bas medium. Les E107 quant à eux misent très clairement sur les basses.
L'écoute de l'ensemble des titres cités m'a permis de
Globalement les TG! 334 font valoir leur raffinement sur les cuivres, leur emphase (par rapport aux 2 autres) sur le haut medium/bas aigu donne une sensation assez jouissive sur les cymbales qui sonnent fabuleusement naturelles. Les SE répondent par la consistance de leur son, cette sensation que tout est rempli sans oublier aucune fréquence (même si le haut est en retrait). Les E107 s'ils impressionnent en bas sonnent par contre un poil faux sur les cuivres, probablement dû à ce manque par rapport aux basses sur ces intras clairement descendants. Du coup il leur manque quelques détails, des harmoniques et la latéralisation en pâti. Le son paraît plus congestionné là où les T! 334 explosent grâce à leur scène qui laisse beaucoup de respiration aux instruments alors que les SE5 détourent vraiment bien le message, l'avantage de leur rapidité plus grande ?
C'est par exemple sur le jazz de Miles Davis que les TG! 334 s'éclatent grâce aux cuivres tandis que les SE5 adorent la modernité ultra bien enregistrée de Daft Punk. Modernité également appréciée des E107 qui peuvent pleinement laisser s'exprimer leurs basses si profondes. A ce niveau clairement, on sent la patte dynamique avec cette sensation presque palpable de la membrane. Les SE5 font cependant un excellent job en descendant tout aussi bas, avec du corps mais un peu moins de consistance. Les TG! 334 sont eux largués en décrochant assez vite par rapport à leurs concurrents.
Point étonnant, si les concurrents ont finalement globalement joué sur les détails et donc la signature aussi, c'est sur la piste qui aurait dû tamiser les débats qu'au contraire sont apparues les différences les plus claires : le black metal dégueulasse de Darkthrone. Le froid, le glacé se perdait dans la chaleur soudainement excessive des E107. Les SE5 donnait une meilleure partition, mais peut-être trop justes, devaient clairement céder devant l'excellence, aussi étonnante qu'évidente, des TG! 334 qui brillaient grâce à leurs aigus bien mieux mis en avant probablement. Signe que la tolérance n'est pas forcément là où on l'attendait.
Au final, ce combat sans mort m'aura laissé des traces. Traces du pourcent, car les E107 bien loin de leur centième de valeur se sont étonnamment bien comportés. Ils laissent la main sur les détails, la scène, la dynamique, mais pourtant, malgré leurs basses exquises ne s'en laissent pas tant compter sur le reste. Ils ne sont clairement pas largués et s'ils s'effacent logiquement face à des intras du haut du panier, ils ne rougissent absolument pas. Et c'est peut-être bien l'enseignement le plus terrible de cette joute, c'est que les pourcents à gagner se paient au prix fort avec les recettes pépites à bas coût. Fort heureusement pour moi, j'ai pris mon pied avec les TG! 334 et les SE5 sont des maîtres de droitures intensément remplie, mais leur écart de prix est difficilement justifiable. Le prix du plaisir supplémentaire, ce l'ultime poussée d'adrénaline sonore. Mais sachez que si vous souhaitez partir avec des E107 dans les oreilles, vous ne perdrez pas tant que ça, peu même eu égard à ce qu'on attendrait. Vous en seriez seulement quitte pour une signature radicalement différente, seule certitude très clairement audible. Le reste, ce sont surtout des détails. Et c'est heureusement tout le piment qui fait que nous sommes chacun à notre niveau dans une quête audiophile.